Association Grandir d'un Monde à l'Autre

par Olivier Raballand

Lorsqu’un homme se pose des questions sur son identité, lorsqu’il s’interroge sur le fait de vivre parmi d’autres êtres humains, cet homme-là peut-il être réceptif, ouvert à la relation, à la rencontre, à l’autre en général et à l’autre différent, à l’étranger en particulier ?
Il en va de l’humain à l’échelle individuelle, comme d’un pays à l’échelle collective, à celle d’une nation. Et si ladite nation se demande ce qui la fonde et comment elle existe, si cette nation créée un ministère de l’identité nationale qu’elle relie directement à celui de l’accueil de l’autre, de l’étranger, si cette nation se pose des questions fondamentales sur son identité, sur son histoire et ses principes de laïcité source de sa démocratie, comment, avec toutes ces questions, arriver à accueillir l’autre, différent par son origine ou sa constitution ?
Alors que nombre d’économistes nous disent que nous avons besoin d’immigration, que notre pays ne peut vivre sans cela, nous venons tout juste d’échapper à la déchéance de nationalité pour le français d’origine étrangère pris la main dans le sac.
Alors que nombre de psychiatres nous disent que les personnes souffrant de schizophrénie sont statistiquement plus souvent victimes que bourreaux, on remplace des postes de professionnels par des chambres capitonnées, et de possibles libertés par des portails vidéosurveillés et des bracelets électroniques.
Cette manière de pointer la différence, incarnée par le rom, l’exilé des nouvelles révolutions, le « fou », ne conduit-elle pas directement à une «déshumanisation» de l’être humain ? Ne plus voir l’homme mais son statut, sa pathologie et par un doigt accusateur l’enfermer dans cette représentation de la menace à l’ordre public, menace aux fondements même de notre identité ou notre sécurité nationale.

Sont-ce là les bases d’une politique de civilisation (1) ?
L’étranger est-il si étrange ? Le « fou » est-il tant à lier avec autre chose que son environnement social ? Je me souviens du slogan « Tous différents,  tous égaux (2)», je me souviens de la devise républicaine « Liberté, égalité, fraternité », je me souviens de l’article 1 de la Déclaration des droits de l’homme.

Olivier Raballand

1 Pour une politique de civilisation, livre d’entretiens avec Edgar Morin, publié en 1997, qui traite des déficiences et des carences de notre civilisation et invite à mettre en place une politique de civilisation basée sur la régénération de la vie sociale.
 2 Slogan de la  campagne, co-initiée en juin 2006 par le Conseil de l’Europe, la Commission européenne et le Forum européen de la Jeunesse, qui a pour but de promouvoir la diversité, les droits humains et la participation des jeunes. Elle est relayée en France par le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative autour de trois thèmes majeurs : la lutte contre les discriminations, la diversité et les droits de l’homme.