Association Grandir d'un Monde à l'Autre

Karine Glouzouic, enseignante de l’ULIS du collège Notre-Dame du Loroux-Bottereau, revient sur le projet écriture qu’elle mène avec ses élèves depuis 2008 et qui l’a conduite à solliciter Grandir d’un Monde à l’Autre.

A priori, feuilleter les pages d’un livre est une activité simple, surtout pour une enseignante. Alors constater, sur les chemins du handicap, que cette activité est source d’angoisse, de refus, de colère et de reflet continuel de l’échec, renforce l’idée qu’il y a là, encore, un moyen de réduire l’intégration de tous dans ce monde, car, lire permet de comprendre le monde qui nous entoure et donc d’y participer.

Ma motivation, pour lancer ce projet, a été de redonner le goût de la lecture à mes élèves... J’ai alors choisi, non pas de leur imposer l’objet de l’anxiété (le livre), mais de le leur faire créer.
Au départ, je ne m’attendais pas à ce qu’ils s’investissent autant dans l’écriture d’un récit et que l’édition d’un livre soit envisageable. Ce qui m’importait c’était de les mettre en confiance. Mais, ce projet a éveillé leur curiosité et ils se sont montré très motivés. Ainsi, ensemble, nous avons essayé de faire bouger cette image, cette vision du monde dans lequel ils ne se sentent pas valorisés ; mettre en évidence la richesse qu’ils détiennent et qu’ils n’osent pas exploiter... et alors progressivement, au fil des lignes écrites, j’ai vu se dessiner les premiers sourires devant ce qu’ils accomplissaient.
L’intérêt de cette aventure pour les élèves du dispositif ULIS est aussi d’avoir partagé des moments, des regards, des paroles, des idées … avec des élèves d’une classe de sixième. Pourtant pour ces jeunes, de part et d’autre, la mixité n’est pas toujours une évidence et même si elle est souhaitée, elle est difficile à mettre en œuvre. Pour les élèves de l’ULIS, le regard de l’autre, ce collégien valide est comme une bénédiction. « Va-t-il m’ accepter comme je suis avec ma différence ? » Cette question, ils se la sont posée avant chaque rencontre et malgré leurs peurs ils ont repoussé leurs propres limites en acceptant de faire entrer « l’autre » et ses idées dans leurs univers. Aujourd’hui, leur regard a déjà changé. Ils sont conscients du travail réalisé et des échanges réussis qu’ils ont pu avoir avec d’autres collégiens. Lorsque l’on parle avec eux du projet ils sont fiers et c’est peut-être bien cela le plus important dans cette aventure.